Cet article constitue pour nous l’occasion de présenter et d’interroger un dispositif de médiation corporelle à destination d’adolescents hospitalisés dans une unité de pédopsychiatrie. Il s’agira de montrer comment la proposition d’utiliser des tissus et le mime, comme espace de mobilisation du corps, peut constituer un support à la subjectivation et à la transformation psychique, tout spécialement à cette période-là de la vie.
Freud aborde le fantasme de fustigation « on bat un enfant » comme faisant partie de la dynamique psychique de tout individu. Il se manifeste à la fin de la période infantile et est issu de remaniements psychiques rythmés par trois phases. Une réécriture de ce fantasme émerge lors de l’adolescence. Frapper le parent est considéré comme la mise en acte de ce que tout adolescent fantasme : « Je bats mon parent ». On comprend que les phases surviennent de façon télescopée, toutes au même moment, portées par la flambée pubertaire. Chacune vient marquer un mouvement différent d’élaboration de la séparation d’avec les figures œdipiennes. La réémergence de ce fantasme à l’adolescence vient déborder le système de pensée, laissant coexister de forts désirs œdipiens tout en punissant un autre de ne pas les avoir arrêtés.
Partant du suivi thérapeutique individuel d’une jeune patiente de treize ans, Clémentine, nous explorerons les retentissements que peut avoir un lien sororal trop fort, et la façon dont il s’avère parfois être un frein au processus de séparation-individuation. Porté à son comble dans le fantasme de gémellité, il en découle un Moi aux contours imprécis, et une poursuite de la relation potentiellement délétère pour un sujet au narcissisme fragile. Indifférenciation des corps et des appareils psychiques, l’anorexie vient faire éclater cette bulle spéculaire, lorsqu’un seul des sujets atteint une puberté physiologique. Dans l’espace de séparation physique et psychique qu’offre le cadre de l’hospitalisation, les entretiens cliniques nous éclaireront sur les modalités de ce passage d’un double vers un soi, et nous aideront à réfléchir sur les enjeux et les limites de la mise en place d’un travail de subjectivation.
Le processus d’« adultisation » est une étape développementale particulièrement périlleuse, en ce qu’elle fait suite à l’envahissement pulsionnel pubertaire qui nécessite une médiatisation opérante dans la confrontation au réel et au social.
À partir de la clinique de l’actualisation somatique, qui témoigne de la précarité des ressources mentales face à un conflit psychique, et s’accompagne dans certains cas de la mise en œuvre d’une défense caractéro-comportementale, constitutive du handicap somatopsychique, mais susceptible de permettre de contre-investir les effets d’un trauma archaïque, nous proposons ici d’interroger les problématiques de l’excitation corporopsychique, et de discuter du concept d’(ab)négation comme mécanisme défensif spécifique, distinct des autres formes classiques de négation défensive.
À partir tant de la biographie que de l’œuvre poétique et des lettres d’Afrique d’A. Rimbaud, l’auteur propose trois hypothèses : premièrement, dans une première partie de sa vie, celle poétique, l’écriture de Rimbaud lui servit de déflexion et réfraction à la psyché afin de créer un espace tiers que le père ne sut/put occuper face à l’omniprésence maternelle. Dans la deuxième partie de sa vie se fut la vie en Afrique, lieu où avait vécu le père et « le droit de s’en aller » (Baudelaire) qui servirent cette « modalité déflexive », forme de « subjectivation-action » qui est le propre de l’adolescence. Deuxièmement, nombre de pièces poétiques d’A. Rimbaud furent, comme P. Aulagnier le montra ailleurs, autant de projections d’une reconstruction du passé sur l’avenir, opérations indispensables au narcissisme adolescent. Troisièmement, le mouvement mélancolique propre à la construction subjective adolescente trouve dans l’écriture poétique (génialement chez A. Rimbaud et habituellement chez les autres pubères, y compris dans les chansons) un objet évanescent et toujours à retrouver, compulsionnellement, dans et par un « travail d’écriture » confrontant celui-ci au « travail de mélancolie » de l’objet primaire perdu.
Ce texte regroupe des travaux antérieurs d’orientation diverses pour mieux définir la sublimation pubertaire. Celle-ci constitue un ensemble de processus engageant l’expérience pubertaire vers la subjectalisation et l’objectalisation adolescentes. Elle s’exprimerait à un niveau archaïque par l’interprétation que l’infantile élargi porte sur les traces pubertaires. À un niveau secondaire, elle préside à la construction des idéaux d’adolescence. Si la subjectalisation est en fait une intersubjectalisation, on peut parler de co-sublimation trouvant ses origines dans l’état d’illusion et de désillusion pubertaires. Le sujet parental de transfert en est le porte-parole. Maître processus de la création adolescente, la sublimation y serait organisée par la pulsion d’emprise du Moi et de ses idéaux tels qu’ils se remanient entre infantile et adolescence.
Justine est une adolescente qui présente un fonctionnement limite et dont les symptômes principaux sont des vomissements provoqués et répétés. Elle expulse les aliments comme elle évacue la pensée. Elle investit les actes en se débarrassant de la tension interne. L’effraction de la sexualité renforce l’impossibilité d’investir une position passive comme si elle réactivait le temps originaire de la séduction.
L’auteur décrit la difficulté à trouver sa place dans l’espace de la psychothérapie, alors qu’il y a échec de la mise en scène psychique chez la patiente. Condamnée à l’expulsion dans un premier temps, et cherchant à contrer son vécu de passivité, elle évoque l’épreuve périlleuse que représente l’approche mélancolique vers la reconnaissance de l’altérité de l’objet, dans les traces internes qu’il lui a laissées.
À travers le cas d’un adolescent au père violent, il s’agit de montrer que l’identité, notion processuelle et susceptible de remaniements, a besoin de s’étayer sur des modèles culturels collectifs aujourd’hui largement mondialisés, mais repris et utilisés de façon singulière par les sujets. La création d’une néo-identité qui s’appuie sur des modèles d’invincibilité et de toute-puissance est le signe que toute création identitaire ou tout mouvement d’affirmation subjective mobilise intrinsèquement une violence susceptible de mener à la haine de toute altérité.
Cet article se propose de montrer ce qui se joue pour l’adolescent vivant au Liban au cours de sa formation identitaire, en cherchant plus particulièrement à comprendre le retentissement du contexte socio-historique du pays sur les difficultés psychiques que celui-ci éprouve et plus spécifiquement comment les caractéristiques de ce contexte résonnent avec les transformations liées à celles de la période adolescente. L’analyse d’un entretien clinique de recherche réalisé auprès d’un adolescent résidant à Beyrouth et les élaborations personnelles de l’auteur que son implication dans cette problématique l’a conduit à produire montrent la confrontation entre « l’expérience vécue au niveau de la crise personnelle » et celle vécue au niveau « de la crise politique ». L’hypothèse est posée d’un redoublement de la menace intrapsychique inhérente au processus de création adolescente par le poids de la menace externe émanant du contexte politique.
L’article témoigne d’une expérience de trente ans auprès d’une « jeunesse en danger », Noar Besikoum, rencontrée dans les maisons de jeunes Beit Ham en Israël. L’auteur montre en quoi le contexte social et historique, sur fond de conflit israélo-palestinien, influe sur la manière dont ces jeunes, en particulier les jeunes Israéliens, vivent et traversent l’adolescence.
Adolescence, 2011, T. 29 n°4, pp. 843-848.
Revue semestrielle de psychanalyse, psychopathologie et sciences humaines, indexée AERES au listing PsycINFO publiée avec le concours du Centre National du Livre et de l’Université de Paris Diderot Paris 7