Tous les articles par Admin

Vincent Di Rocco : « sur le bord du monde ». processus psychotiques et processus créateurs au sortir de l’adolescence

À travers le cas de Émétério, jeune schizophrène photographe de talent, l’auteur souhaite montrer l’importance des liens entre les impasses de la subjectivation du processus adolescent et l’émergence d’états psychotiques au sortir de cette période de l’existence. Dans le cadre psychothérapique, le travail artistique et le travail du rêve se rejoignent dans une tentative de représentation réflexive des processus psychiques en échec. L’analyse clinique porte plus spécifiquement sur la dialectique des processus dits « limites », oscillant entre création et effacement des limites différenciatrices en lien avec les hypothèses de G. Lavallée sur la rupture de la boucle réflexive contenante et subjectivante de la vision. L’auteur fait aussi l’hypothèse que les destins de ce travail de construction et de déconstruction suscitent un intérêt particulier des adultes à propos des rapports que tisse l’adolescent avec la création et la mort.

Adolescence, 2011, T. 29 n°1, pp. 135-145.

Anouk Imhof : Thomas et l’infini

L’adolescence, période propice aux passages à l’acte du fait des remaniements internes et externes du sujet, est une période de paradoxes : besoin d’autonomie et de dépendance, activité et passivité. Il est ainsi difficile pour certains adolescents d’être à l’origine d’une demande de soin qui les place dans une position de dépendance envers l’adulte-thérapeute. Les traitements ordonnés de justice, l’une des mesures protectrices à la disposition des juges pour mineurs, permettent d’obliger l’adolescent à suivre un traitement psychique. L’article discute la place de cette mesure dans les prises en soins à l’aide d’une vignette clinique qui concerne un adolescent de quinze ans, pris dans une relation symbiotique à sa mère, victime de violences physiques de la part de son père dans son enfance et qui, après s’être montré violent à l’égard de sa mère, menace de tuer l’assistante sociale qui a ordonné son placement dans un foyer. Le traitement ordonné de justice à l’adolescence : entre contrainte et étayage ?

Adolescence, 2011, T. 29 n°1, pp. 113-134.

Yves Morhain, Emilie Morhain : la création adolescente

Le travail de création est au centre même de l’opération adolescente, marquée par la rencontre avec l’autre sexe, la confrontation aux limites et au malaise narcissique, mais aussi aux désillusions qui résultent des promesses et des espoirs infantiles. Ce profond bouleversement ouvre la voie à l’acte créatif voire à la création. Émergence d’originalité, expression intense, quête d’idéal, découverte de systèmes de pensée, production d’objets culturels nouveaux, souci de mise en scène, sont des traits caractéristiques de la création artistique qui se retrouvent dans le processus de création de soi qu’est l’adolescence. L’acte de création renverrait-il au processus d’adolescence en tant que paradigme de la crise créative ? Est-il spécifique du passage adolescent pour y traduire les inquiétudes et les déchirements de cette période de la vie ? Ou bien, n’est-ce pas l’adolescence que ce vouloir créer pour devenir soi-même, à travers un mélange de volonté destructrice et de désir créateur ?

Adolescence, 2011, T. 29 n°1, pp. 87-111.

Laetitia Petit, Jean-Jacques Rassial : les transferts et le début de la cure psychanalytique de l’adolescent

Le dispositif psychanalytique constitue une des possibilités d’indication thérapeutique, limitée par la prévalence du maniement du transfert, quand la crise d’adolescence est un moment ordinaire de labilité des manifestations pathologiques de révision des états de la structure. C’est pourquoi le principal critère d’indication n’est alors ni la spécificité des troubles manifestés, ni le diagnostic de structure. Les entretiens préliminaires sont alors fondamentaux pour évaluer cette indication qui sera décisive, mais qui reste néanmoins temporellement dépendante de l’engagement transférentiel de l’adolescent.

Adolescence, 2011, T. 29 n°1, pp. 79-86.

François Richard : l’adolescent a-t-il changé ? nous avons changé

Cet article envisage la spécificité des actuelles pathologies adolescentes (fonctionnements en processus primaires sans limites, externalisation des conflits intrapsychiques, recours à l’agir, à la violence et à l’excitation auto-calmante) du point de vue de la complexité de la Psyché, susceptible de combiner conflit pulsionnel œdipien et problématique de l’archaïque. Ce sont les modalités du travail analytique qui doivent être interrogées. Des hypothèses sur la rencontre intersubjective en séance, ainsi que sur un nécessaire dépassement de l’opposition narcissisme/relation d’objet, sont proposées en direction d’une pensée de l’altérité.

Adolescence, 2011, T. 29 n°1, pp. 67-78.

Marie-Christine Aubray : se laisser surprendre

L’analyste, confronté à des butées transféro-contre-transférentielles, au sein de cures avec des adolescents en grandes difficultés de subjectivation, peut être amené à aménager le cadre de la thérapie en recevant ponctuellement les parents avec leur adolescent. Dans cet espace pluri-dimensionnel, il s’ouvrirait à la possibilité d’être « surpris », transformé dans son fonctionnement psychique en vue d’une relance de sa fonction subjectalisante auprès de l’adolescent.

Adolescence, 2011, T. 29 n°1, pp. 63-66.

Ignacio Melo : le travail de composition dans les consultations avec des adolescents

Je décris dans cet article ma pratique de la consultation thérapeutique avec les adolescents, l’explicitant à travers quatre extraits d’entretiens, après une réflexion de certains auteurs qui m’ont aidé à la penser. Je parle des conditions qui président la communication avec mon patient, particulièrement l’identification narcissique. Le point central de ma technique est ce que j’appelle le travail de composition, ainsi défini : Le travail de composition est une mise en récit d’éléments divers, parfois inconscients, le plus souvent préconscients et manifestes. Il met en lien, aussi, les différents régimes de fonctionnement. Création de la séance, ses constituants viennent indistinctement de la présentation du patient ou de la pensée de l’analyste. Ce dernier prend en charge la narration sur un mode propositionnel, dit la souffrance autrement que de manière symptomatique et ne vise pas une vérité profonde. Sur un plan concret cela signifie qu’il doit être prêt à l’abandonner, si le patient la juge déplacée ou inutile. Son caractère explicatif est porteur de sens, mais n’est pas nécessairement une hypothèse causale et peut prendre la forme de la mise en scène d’un conflit, ou de la formulation d’un paradoxe. La composition est un récit qu’on peut réécrire à l’infini, si besoin. Elle est aussi une proposition d’un mode de fonctionnement : des expériences variées, source de douleur ou de joie, parfois contradictoires, voire paradoxales, peuvent se dire à travers une narration. Et l’analyste invite le patient à devenir lui-même compositeur, et, ce faisant, en éprouver un soulagement ou, même, du plaisir. Dans ce sens, la composition est un instrument de transformation. Je termine en précisant que ce travail doit conduire à une déconstruction des fonctionnements gênants, source de souffrance et empêchant le développement psychique.

Adolescence, 2011, T. 29 n°1, pp. 9-62.

Philippe Gutton : éloge funèbre du papier

Cette exclamation insérée dans ce troisième volume sur le virtuel concerne l’angoisse ou la tristesse que provoque, pour bien d’entre nous, la disparition du livre papier. Pour ceux qui comme moi aiment écrire ; pour ceux qui aiment lire sans investir un écran trop associé dans ma génération à la télévision aux programmes médiocres et publicitaires ; pour ceux qui se repèrent volontiers chaque soir ou matin à côté de certains livres élus, interrogés avec sécurité et curiosité ; pour ceux qui éditent à une époque où le papier, séquelle de l’arbre des forêts, est en Europe si cher ; pour ceux qui enseignent non seulement en université mais aussi dans les collèges et face à l’habile compétence de leurs cadets dans le domaine informatique se soumettent, irrités, à cette bascule pédagogique.

Adolescence, 2012, T. 30, n°1, pp. 233-224.

Monique Bydlowski : une conquête du virtuel : la psychanalyse en Chine

Les premières lignes

Un article paru dans un récent numéro du New Yorker rapporte la récente diffusion de la psychanalyse en Chine.

Vu de loin, rien de plus normal : des millions de Chinois accèdent au confort des classes moyennes occidentales et aspirent à des soins psychiques modernes. Or la psychiatrie chinoise est peu présente. La maladie mentale a mauvaise réputation. Encore récemment, les troubles mentaux sont soignés par des médecins « herboristes » qui tentent de rééquilibrer les sept émotions fondamentales (bonheur, peur, colère, tristesse, amour, haine, désir), ou par des « sorciers » qui calment les esprits déchaînés des ancêtres. La psychopathologie clinique est inexistante, bien que Freud soit traduit en chinois depuis des décennies, à partir de l’anglais.

Adolescence, 2012, T. 30, n°1, pp. 229-232.

Béatrice Mabilon-Bonfils : Les « pratiques numériques », entre écrit et sociabilité

Avec l’intensification et la complexification des communications utilisant les nouvelles technologies, émerge un nouvel espace public, dépassant la césure virtuel/réel, dans un entrelacement de dispositifs sociaux et de communautés partiellement virtuelles. L’être-ensemble des adolescents s’y exprime par une reconfiguration des différentes formes d’interaction, utilisant  « le français tchaté ». Ces pratiques langagières numériques sont-elles un obstacle à l’acquisition de compétences langagières et sociales ?

Adolescence, 2012, T. 30, n°1, pp. 217-229.