Tous les articles par Admin

Véronique Nahoum-Grappe: le corps imaginaire de l’adolescent

Il s’agit ici de cerner l’imaginaire social contemporain concernant l’adolescence. La réflexion relève de la sociologie qualitative, c’est-à-dire d’une tentative de description phénoménologique de certains signes choisis comme caractéristiques mais qu’aucune statistique objectivante ne peut légitimer. L’auteur voudrait repérer la contradiction qui existe entre l’exhibition publicitaire du corps jeune et beau et certains traits de l’esthétique adolescente telle qu’elle peut être saisie dans leurs choix de style de présentation de soi, de formes musicales, de bandes dessinées, etc.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 292-304.

Michelle Cadoret: contexte et culture. Violence de la scène adolescente

Chaque adolescent est, à chaque génération, violemment pris dans un contexte social et impliqué dans une problématique de transmission et de filiation, de dette et d’héritage. Seuls ou en groupe, les adolescents sont des acteurs/témoins qui introduisent leurs objets, discours et conduites dans leurs lieux de passage. L’adolescence est une catégorie instable, sans véritable place, qui peut s’approprier le lien social ou le mélancoliser. La scène adolescente, vulnérable, interpelle les institutions et demande que soit aménagé un espace potentiel qui permette la transformation des registres du psychique et du social impliqués dans ce passage. Elle est un point nodal où se condensent des enjeux individuels et collectifs, où se précipitent et se cristallisent des violences. La scène adolescente se présente comme une violente dramaturgie à la croisée du psychique et du social.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 291-303.

Raymond Cahn: sous les valeurs, la violence: à propos de Télémaque

Télémaque est l’exemple même de la réussite d’une adolescence achevée et de l’entrée dans l’âge adulte. Modèle déconstruit, chacun à sa manière, par Fénelon et Aragon, laissant apparaître une violence pulsionnelle dont le fonctionnement mental s’alimente en même temps qu’il s’efforce, avec un bonheur variable, de la dompter et révélant ainsi la richesse et la profondeur de cette figure mythique.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 305-321.

Serge Lesourd: de la violence narcissique à la construction de l’image de la mère. A propos d’une adolescente « incasable »

À propos de la prise en charge d’une adolescente « incasable » dans un centre d’accueil d’urgence, l’auteur développe une lecture des troubles narcissiques primaires qui reposent sur un trouble de la construction de l’image psychique de la mère pour le sujet. C’est alors le corps, le sien et celui de l’autre, qui fait fonction de « contenant » dans la relation, entraînant face aux interdits, une réponse en acte et non pas dans le langage. La prise en charge de ce type d’adolescent implique la reconstruction, sous transfert, d’une image de mère intériorisée et par là même de faire du corps archaïque, un corps pris dans le langage et dans les signifiants.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 291-303.

Josette Frappier: la violence de l’héroïsme en héritage

La lecture des tragédies de Sophocle concernant la famille des Labdacides,  » Œdipe Roi « ,  » Œdipe à Colone « ,  » Antigone « , offre un exemple de la compulsion de répétition à l’œuvre dans la succession de passages à l’acte violents, comme conséquence de la violence psychique traumatique transgénérationnelle. Avec le mouvement de subjectivation propre à l’adolescence, l’héritage du trauma psychique peut engager le sujet, telle Antigone, dans une identification héroïque qui, pour la bonne cause, ne fera néanmoins qu’alimenter la répétition de la violence.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 291-303.

Jean Laplanche: la soi-disant pulsion de mort: une pulsion sexuelle

Dans une première partie, historico-critique, l’auteur montre la fonction de l’invention de la pulsion de mort dans l’évolution de la pensée freudienne. La pulsion de mort correspond à un rééquilibrage au sein de la théorie de la sexualité, alors qu’elle est considérée à tort comme un ajout externe à celle-ci.

Dans une seconde partie, métapsychologique, l’auteur situe la pulsion de mort dans la genèse de l’appareil psychique, comme un des résultats du refoulement originaire, constitutif du ça. L’opposition pulsions sexuelles de vie / pulsions sexuelles de mort correspond à la polarité fondamentale : liaison / déliaison.

Dans une troisième partie, l’auteur esquisse une théorie psychologique générale du problème de la haine, à partir de trois facteurs : l’agressivité autoconservatrice ou combativité – la violence sadique de la pulsion sexuelle de mort – la jalousie spéculaire narcissique

Adolescence, 1997, T. 15 n°2, pp. 311-328.

Régine Waintrater: grandir pendant la Shoah, l’ adolescence empêchée

L’adolescence se caractérise par un besoin d’étayage sur la réalité externe. Dans le cas d’une catastrophe sociale et psychique comme la Shoah, la destruction de la réalité externe prive le sujet d’étayage, le laissant ainsi aux prises avec une réalité interne vécue comme destructrice. En l’absence de structures médiatrices comme le groupe des pairs ou l’école, l’adolescent aura recours à des mécanismes comme la répression des affects ou le déni, dont le maintien prolongé marquent de façon indélébile son devenir psychique.

 

Adolescence, 1997, T. 15 n°2, pp. 311-327.

Guy Lavallée: pas le temps! Notes sur les contenants du temps

L’article décrit un adolescent qui a été un enfant autiste, aux prises avec l’angoisse du temps, dans un travail de « médiation symbolisante » avec la vidéo, en hôpital de jour. L’auteur met en évidence l’ensemble des conditions cliniques qui permettent à cet adolescent de sortir d’un état de chaos et d’excitation psychotique atemporel. L’analyse de l’impact psychique du dispositif technique vidéo permet de comprendre que l’investissement en emprise fixe et contrôle le temps, tandis que l’hallucinatoire le réactualise et le suspend pour un bref moment d’éternité. En constituant une position thérapeutique spécifique contenante, l’auteur permet à cet adolescent d’orienter et de freiner la flèche pulsionnelle du temps, puis, de créer un minimum vital de continuum temporel. Une ultime séquence clinique décrit le passage d’un état d’angoisse de précipitation panique, dans le temps de la séparation, à la possibilité de penser sereinement le temps des retrouvailles.

Adolescence, 1997, T. 15 n°2, pp. 310-336.

De l’ensemble de ces observations, l’auteur dégage quelques jalons pour une théorie psychanalytique des contenants du temps de la pensée.

Claude Savinaud: le sens de l’irréparable

Le passage à l’acte délictueux de l’adolescent peut être reconnu comme un acte de passage venant ponctuer la nécessaire transformation de l’image du corps propre dont découle le remaniement des images parentales. Le masochisme érogène y joue un rôle prépondérant, qui tend à substituer à des représentations d’objet inaccessibles un objet « déjà là », le corps de l’adolescent porteur de l’introject maternel. Le retournement de la pulsion sur soi-même et en son contraire lui offre un moyen de contenir l’excitation, un « self-control » fragile maintenant la liaison des pulsions agressives et libidinales, et transformant cet auto-érotisme négatif en masochisme moral. L’irréparable de l’acte fonctionne comme point de départ d’une subjectivation, où le Sujet peut s’approprier ses propres cassures, plutôt que de les attribuer projectivement au contexte relationnel.

 

Adolescence, 1997, T. 15 n°2, pp. 310-326.

Anne Juranville: épilepsie et traumatisme chez l’enfant, réflexion sur une forme moderne de « possession »

Cet article se propose de reprendre, dans le fil de l’interprétation freudienne de Dostoïevski et le parricide, la question du statut psychique de certaines formes de crises épileptiques chez l’enfant et l’adolescent, associées à des situations traumatiques. C’est comme défense incorporative d’essence mélancolique qu’on essaie de dégager la dimension proprement psychosomatique de la crise. Cette crise fait advenir un « sujet », (en fait désubjectivé), possédé par le Surmoi « obscène et cruel » dont parle Lacan. Crise qui apparaît comme un deuil impossible, pour autant que, dans sa violence de nature pulsionnelle, elle « récupère » la charge libidinale du trauma en le répétant sur un mode « infernal » (Freud). Les perspectives thérapeutiques impliquées par une telle fonction paradoxale du traumatisme prolongent le dialogue théorique et clinique ouvert entre Freud et Ferenczi.

 

Adolescence, 1997, T. 15 n°2, pp. 309-326.