Les projets des mineurs isolés étrangers sont au carrefour de l’imaginaire migratoire, du rêve d’avenir personnel ou familial et du projet personnalisé co-construit avec les éducateurs. Bien souvent, ceux-ci s’opposent dans une pratique où l’adaptation à la réalité doit se faire en renonçant aux rêves considérés comme « utopiques ». Basé sur une recherche anthropologique auprès d’une vingtaine de jeunes mineurs isolés étrangers (MIE) pris en charge en Maisons d’Enfants à Caractère Social (MECS) en Aquitaine et en s’aidant du concept d’espace potentiel théorisé par D. W. Winnicott, cet article propose de penser différemment la construction du projet chez ces jeunes en considérant leurs rêves d’avenir comme de possibles leviers d’accompagnement.
Les doutes diagnostiques sont fréquents chez les adolescents présentant des troubles psychiatriques aigus, qui plus est isolés et étrangers, avec un risque d’erreurs diagnostiques – et de soins inadéquats – tel qu’un excès de diagnostics de troubles psychotiques plutôt que de dépression ou de syndrome post-traumatique. Le parcours de soins de Lila, une adolescente de seize ans d’origine rwandaise, illustre cette problématique des erreurs diagnostiques ou misdiagnosis que l’accès aux études sur les errances diagnostiques et l’abord transculturel réduisent.
Si les parcours des jeunes isolés étrangers sont variés et leurs histoires toujours singulières, ces adolescents présentent en psychopathologie clinique des problématiques communes. Une proportion non négligeable de ces jeunes présenterait une symptomatologie clinique de transe ou de possession, appelée DTD (dissociative transe disorder) dans le DSM IV. Les symptômes de transe et de possession sont probablement sous-évalués dans les pays occidentaux du fait de biais culturels et d’une connaissance insuffisante des troubles dissociatifs. Les patients présentant ces symptômes sont souvent sujets à des erreurs diagnostiques, notamment à des diagnostics de psychoses ou d’états limites ce qui conduit à des prises en charge pouvant aggraver leurs symptômes. Les fonctions de ces symptômes chez les jeunes isolés étrangers sont multiples et doivent être analysées en tenant compte de cette période particulière du développement qu’est l’adolescence, en particulier des enjeux de construction identitaire. Une meilleure compréhension de l’expérience subjective de ces jeunes nécessite une adaptation du cadre thérapeutique prenant en compte la dimension transculturelle et les enjeux pré-, péri- et post-migratoires. Nous confronterons nos hypothèses à une revue de la littérature psychiatrique et à l’étude d’une observation clinique.
Cet article montre qu’il est possible d’évaluer chez des adultes, âgés de soixante-seize ans à quatre-vingt-deux ans, les effets psychiques d’événements traumatiques vécus il y a plus de soixante ans. Ici, est présenté le processus de construction d’une adolescente juive entre 1940 et 1945 en France. Au-delà d’une adolescence confisquée, la situation clinique exposée montre les troubles psychopathologiques liés aux traumas cumulatifs : un devenir adulte empêché, un accès à la maternité difficile, une conjugalité et une parentalité en souffrance ainsi qu’un silence pesant. La retraite permet la libération tant attendue depuis 1945, notamment par la reconnaissance collective et le processus de l’écriture.
Au Brésil, entre 2002 et 2010, plus de 230 000 jeunes, entre 15 et 25 ans, ont été assassinés. Cet article propose une analyse des vicissitudes de la construction subjective des adolescents brésiliens immergés dans un environnement de pauvreté, d’anomie sociale et de violence. À partir de la création d’un dispositif clinique groupal, les groupes de conversation, d’orientation psychanalytique, réalisé auprès des adolescents en milieu scolaire, l’auteur a pu construire l’hypothèse suivante : étant donné la violente disqualification de leur vie et le manque absolu de perspective d’une inscription dans un lien à minima indicateur de participation phallique dans le champ social, certains jeunes font de la violence leur propre fiction et une modalité de lien social. Depuis un fragment de cas, l’auteur propose également d’aborder la méthode utilisée dans la conduite de ces groupes de conversation.
Les adolescents vivant en banlieue expriment souvent la honte de leurs origines sociales, culturelles et géographiques. Cette problématique est (ré)inscrite dans la géopolitique des émotions dans le monde, et ce afin de mieux comprendre les enjeux identitaires pour les adolescents. À partir de deux vignettes cliniques d’adolescents rencontrés en Maison d’Enfants à Caractère Social, nous montrons l’importance du contre-transfert culturel et de l’écoute à plusieurs niveaux dans l’élaboration de la charge émotionnelle à travers le processus créateur.
Cet article met en perspective l’intérêt de faire dialoguer les disciplines lorsque l’on aborde l’aire du traumatisme historique. Cela est favorisé par le complémentarisme, fondement du transculturel, qui permet l’articulation de la psychanalyse et de l’anthropologie, mais aussi de l’histoire et du politique. Ce propos est soutenu par une recherche sur les « émeutiers » de l’automne 2005, identifiés comme étant des adolescents français « d’origine immigrée ». Aux prises avec le déni collectif du colonial, ces adolescents, révoltés par leur réalité contemporaine, se font aussi l’écho de leur longue et toute spécifique histoire de France.
L’Équipe de Recherche et d’Intervention Transculturelle (ÉRIT) a développé pour le milieu scolaire une intervention préventive pour les jeunes immigrants ou réfugiés. Celle-ci se compose d’un programme d’ateliers d’expression créatrice nommé Théâtre-Pluralité, qui utilise le jeu social et théâtral afin de permettre aux jeunes de naviguer entre leurs multiples appartenances, et d’élaborer leurs expériences passées et présentes. Les ateliers ont pour but de faciliter la réappropriation et le partage d’histoires personnelles et collectives de ces adolescents.
Dans le suivi psychothérapique transculturel d’un adolescent mineur étranger isolé, avec les référents médicaux ou les travailleurs sociaux, les thérapeutes appréhendent la souffrance psychique, les comportements, les demandes du patient dans un cadre où l’écoute et l’élaboration peuvent se faire dans toute la complexité et la multiplicité des expériences du patient, à partir des matériels culturel et psychiatrique, permettant d’éviter des erreurs diagnostiques et un clivage fréquent entre la culture d’origine et celle du pays d’accueil. Face à une réalité externe faite d’incertitudes, de précarité et d’isolement, comment la prendre en compte sans qu’elle n’envahisse trop l’espace psychothérapique ? Lorsque une demande d’évaluation diagnostique préside au suivi, quelles implications a le diagnostic sur le travail transculturel, particulièrement quand le patient amène des éléments délirants évocateurs de troubles psychotiques ?
À Casablanca, comme ailleurs à travers le monde, des enfants et adolescents vivent dans la rue. Ils sont aux prises avec un passé traumatique, un avenir incertain. La rencontre avec ces enfants et adolescents « exilés dehors » nous a permis de rendre compte de l’environnement défaillant et traumatique qu’ils tentent de fuir en s’exilant dans la rue. Ceci leur confère une place d’étranger inquiétant, craint et rejeté. La rue devient la scène de l’expression de la faillite de l’environnement, le lieu de la survie, de l’expérience de l’intime et du collectif.
Adolescence, 2013, T. 31, n°3, pp. 531-540.
Revue semestrielle de psychanalyse, psychopathologie et sciences humaines, indexée AERES au listing PsycINFO publiée avec le concours du Centre National du Livre et de l’Université de Paris Diderot Paris 7