Tous les soirs entre 21 heures et minuit, les jeunes téléphonent aux radios pour passer à l’antenne, discuter avec les animateurs et souvent leur demander des conseils. L’analyse linguistique d’un corpus de ces émissions de libre antenne met au jour que le français contemporain des cités et ses locuteurs sont perçus différemment suivant les radios. Tandis que Fun Radio stigmatise, NRJ cherche à faire « branché » sans attirer les jeunes issus des quartiers. Seule la radio Skyrock laisse les jeunes parler librement et participe ainsi à la diffusion de mots issus du français contemporain des cités vers l’argot commun des jeunes.
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Dominique Agostini : Créatures de l’hallucinose
Les transformations dans l’hallucinose [Bion W. R.. (1965) Transformations, tr. fr., PUF, 1982.] résultent d’un désastre primitif. Les » terreurs sans nom » car sans contenant suffisamment contenant sont à l’origine de ce désastre et des transformations en question. L’auteur explore avec les mécanismes de l’hallucinose – clivage passif et identification projective pathologique -, le monde des créatures auto-engendrées par ces mécanismes. Les transformations pubertaires transformées dans l’hallucinose constituent le fil rouge de cet article. Un matériel littéraire (Frankenstein) et analytique – les thérapies de Franck et de Victor – amèneront l’auteur à situer le désastre primitif à l’origine des créatures de l’hallucinose dans la cavité primitive. De l’effondrement dans la cavité primitive naissent, à la puberté, des créatures qui, conjointement, masquent et révèlent l’effondrement primaire.
Jean-Pierre Goudailler : français contemporain des cités : langue en miroir, langue du refus
En français contemporain des cités (FCC) ou « langue des jeunes », « langue des cités », plusieurs types de formations linguistiques tendent à montrer que les variétés langagières relevées dans les cités françaises ont un mode de fonctionnement « en miroir » par rapport à ce que l’on constate généralement dans la langue française : il s’agit, entre autres, de la présence d’un nombre très important de mots en verlan (à l’envers) et de l’émergence de l’aphérèse au détriment de l’apocope. De tels comportements langagiers sont autant de manifestations du rejet opéré par les jeunes – et les moins jeunes – des cités et quartiers populaires de France envers la langue légitimée par l’école, la société française. C’est une de leurs manières de réagir à la violence sociale exercée sur eux.
Alain Abelhauser : Comment débuter une analyse à l’adolescence
Deux fragments de la cure analytique d’un adolescent sont l’occasion d’examiner à quelles conditions put s’engager ce travail, et à quel prix il put ensuite se poursuivre. La notion d’éthique s’y avère déterminante, autant pour saisir les caractéristiques de l’engagement initial dans la cure, que les enjeux de sa poursuite, qui se nouèrent autour d’un acting-out particulièrement exemplaire.
Henri Cohen Solal : le jeune reçu-cité
La mise en place de lieux de vie pour les jeunes dans les quartiers défavorisés, porteurs d’une règle fondamentale de non-exclusion, soulève des questions épineuses autour du traitement social et culturel de leur vivre ensemble. Quels sont nos outils de gestion ? Comment utilisons-nous les énergies puisées dans nos désirs de bien faire ? Comment penser la formation d’un éducateur pour répondre à ce défi de l’accueil inconditionnel ? À Jérusalem, la création de maisons de jeunes avec leurs règles de vie, dans le cadre de l’association Beit Ham, nous présente une expérience singulière et quelquefois bouleversante où l’objet culturel sert souvent de trait d’union au dessus du gouffre entre les hommes.
Olivier Douville : du repli « ethnicisé » chez des adolescents en exclusion
Cet article croise les points de vue psychanalytiques et anthropologiques pour analyser les logiques de fractures sociales à l’adolescence lorsqu’elles s’éprouvent et se légitiment en termes de fractures « ethniques » ou « raciales ». Il est fait de ces revendications le symptôme d’une rupture grave dans les montages entre altérité et identité. Le destin de nombreux jeunes, pourtant voués à entrer dans un monde laïque et commun, y est envisagé comme réponse à une logique de ségrégation.
Antoine Kattar : espace de tradition au quotidien. à propos des adolescents libanais
Dans cet article, nous proposons une lecture après coup d’entretiens auprès d’adolescents libanais nés à la fin de la guerre dite civile (1975-1990) vivant leurs rapports intersubjectifs et sociaux dans des situations de fragilité et de précarité à Karm Al Zaïtoun (quartier à Beyrouth Est). Trois espaces de circulation influent sur la formation des processus identitaires de ces adolescents libanais : l’espace « de tradition », l’espace « de survie au quotidien » et l’espace de « modèles identificatoires importés ». Il s’agira ici plus spécifiquement de la relation qu’entretient l’adolescent libanais avec l’espace « de tradition » et l’espace « de survie au quotidien ». Ce dernier est marqué par l’identification aux figures héroïques, la domination territoriale et la ritualisation des pratiques quotidiennes. Cet espace quotidien fonctionne comme espace de survie investi profondément par les adolescents. L’espace de tradition, lui, assure à l’adolescent protection et une forme de continuité de soi mais il reste menaçant et aléatoire dans la mesure où il est traversé par une rupture avec le passé en lien à la guerre. L’absence de confrontation de l’espace avec le temps générationnel ne leur facilite pas la référence à un passé commun et légitimé garant d’une continuité de soi.
Maria Fatima Olivia Sudsbrack : le projet phénix : une démarche collective de protection des adolescents par une mobilisation des ressources familiales et institutionnelles
À la demande du juge pour enfants du Tribunal de Brasilia, l’UFR de psychologie sociale de l’Université fédérale a mis en place un projet avec deux cents jeunes sous mesure de justice et leurs familles. Intitulé « Projet Phénix », le travail vise à renforcer les capacités des familles et des adolescents à se protéger des violences et des emprises de la favela. Les échanges au sein du groupe favorisent la reconnaissance des ressources de chacun. Cet article écrit par Maria Fatima Olivia Sudsbrack, professeur et initiatrice de ce projet, analyse le processus même pendant plus d’une année avec ces jeunes et leurs familles. Elle ouvre, par son témoignage et son analyse des pistes de travail pour les professionnels français de l’éducation.
Teresa Cristina Carreteiro : jeunesses Brésiliennes, institutions et changement dans les groupes défavorisés
Les jeunes Brésiliens, vivant dans les quartiers sensibles où sévit le trafic de drogue, font l’expérience de la violence et sont souvent fascinés par elle d’autant plus qu’ils sont en quête de reconnaissance. Or, pour obtenir celle-ci, ils ne peuvent guère compter sur l’appui des institutions sociales qui ont souvent tendance à les stigmatiser alors que le trafic de drogue les acceuille. Pourtant certaines personnes savent éviter ce piège et surmonter leurs conditions difficiles de vie. Ainsi Daniel, qui a élaboré avec l’auteur, son histoire de vie pendant plusieurs années a réussi, grâce au soutien de certains appuis et malgré une vie remplie d’obstacles et de dangers, à construire sa maison, à travailler de manière régulière et légale, à aider sa famille à s’établir et à changer sa vie en instaurant avec d’autres des liens de solidarité et de convivialité.
Dominique Dray : du choc des mondes à l’entrecroisement de cultures
Les foyers qui accueillent des adolescents des cités sont ici envisagés comme des lieux de contact entre deux cultures – de choc entre deux cultures. Il revient aux éducateurs de créer des liaisons structurelles entre le monde des adolescents et celui de l’éducatif, de travailler à transformer le choc en un entrecroisement de cultures. Ce qui implique un remaniement du cadre institutionnel.
Le placement en foyer est ici envisagé comme une situation proche de la migration. Sans que la pertinence de l’interprétation habituelle des comportements transgressifs des adolescents comme autant de symptômes soit niée, une lecture différente, complémentaire, est ici proposée. Ces comportements sont une tentative qu’opèrent les adolescents pour maintenir leur inscription dans le monde dont ils viennent et, plus généralement, pour régler un conflit de normes.