À partir de trois références différentes (un petit sondage, un livre de G. Haddad et deux vignettes cliniques), l’auteur essaie de poser quelques questions à propos des poignées de main échangées lors des séances de psychanalyse ou de psychothérapie ; une façon par le biais de cet aspect du cadre, d’interroger la place du corps dans la cure, et son éventuelle « mise en séance ».
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Daniel Oppenheim : les adolescents traités pour un cancer et le sentiment d’enfermement
Le sentiment d’être enfermé dans l’univers de la maladie, de l’hôpital, de la médecine fait partie de l’expérience traversée par un adolescent traité pour un cancer. Il est accentué quand le traitement se fait dans une unité « protégée » en raison d’une chimiothérapie avec support de greffes de cellules sanguines souches. La situation d’enfermement concentre et exacerbe tous les éléments de l’expérience du cancer, en particulier la perturbation de la relation au corps (devenu étrange ou étranger) et aux autres (le retrait, la fuite, la demande excessive, la colère), celle du sentiment d’identité, la difficulté à formuler ses pensées et à les exprimer, la peur de penser. Les parents sont eux aussi troublés. Pour aider les adolescents à traverser sans déstabilisation cette phase du traitement et l’enfermement qui la caractérise et, plus tard, à se déprendre de ses effets séquellaires, il importe que le psychanalyste en connaisse suffisamment la réalité pour travailler à partir des éléments divers qui la composent et non avec sa définition globale et les fantasmes qu’elle suscite. Nous décrirons d’abord les éléments constitutifs de ces traitements, puis les repères qui peuvent guider le psychanalyste dans ces situations particulièrement difficiles.
France Audiffred : « est-ce qu’on peut aller là où on ne va jamais ? »
Dans la clinique en institution, les adolescents aveugles font souvent entendre leur crainte de ne pas être vus. Sortir de l’invisibilité suppose de se confronter au regard de l’Autre essentiel à la validation spéculaire et à la question du manque et de la perte infléchie par la privation sensorielle.
Abdelhadi Elfakir : le conte entre rêve et parole : d’une modalité d’articulation du sujet et du collectif
Le sujet de l’inconscient et le collectif entretiennent des relations consubstantielles. Ils sont l’un pour l’autre comme l’endroit et l’envers. Le passage de l’un à l’autre se fait comme sur une bande de Mœbius où l’on ne peut distinguer un intérieur d’un extérieur. Si le sujet de l’inconscient est l’effet des lois du langage, il n’est pas sans prendre la coloration des productions collectives et leurs montages institutionnels qui, par un certain agencement collectif de discours et des énonciations, creusent des canaux et lui confèrent des modalités d’expression spécifiques. Le conte et le rêve, tels qu’ils peuvent se renvoyer l’un l’autre et se déployer dans une parole singulière, se donnent comme des moyens privilégiés pour saisir cette articulation. L’illustration en est faite ici à partir d’une rencontre clinique de recherche, dans un contexte culturel de tradition orale, avec une jeune femme de onze ans, contant les marques d’un destin pour les signes d’une destinée rêvée.
Laurence Chekroun : il y a un temps pour tout
Des pensées me viennent en séance dont je parle d’emblée ou alors que j’engrange précieusement durant des jours, des mois et même des années. Loin d’être mises de côté, elles sont tout autour de nous durant les séances et nous encadrent. J’illustre mon propos avec le parcours psychothérapique d’un adolescent suivi d’abord entre l’âge de treize et quinze ans, puis qui est revenu me trouver à l’âge de dix-huit ans. Il arrive un temps où il devient indispensable d’exprimer ces pensées jamais évoquées. Durant la seconde partie de sa psychothérapie et à l’occasion d’une difficulté pour lui à se rendre régulièrement à sa séance hebdomadaire, je les mettrai en mots.
Dominique Agostini : Mélanie Klein analyste d’adolescents : v. quelques conclusions
Ce texte clôture la série des articles « Mélanie Klein analyste d’adolescents ». L’auteur a, au cours de cette série, successivement étudié quatre cas d’adolescents. Trois furent des patients de Klein : « Félix », « Ilse » et « Willy » ont illustré les concepts d’objets internes, de fantasmes inconscients et de phase féminine commune aux deux sexes ; « Fabien Especel », le quatrième, était, quant à lui, un héros de roman fantastique dont Klein a exploré les identifications projectives.
Dans le cadre de cette conclusion, l’auteur revisite les conceptions kleiniennes des racines infantiles de la « puberté psychique » et de la théorie de la technique avec les adolescents. Ce faisant, il décrit certaines des idées nouvelles qui, fécondées par la pensée de Klein, se sont accomplies depuis la mort de celle-ci. Notamment les nouvelles manières de penser le couple transfert/contre-transfert à partir des explorations de la pulsion épistémophilique et de l’identification projective.
Serge Hefez : attache-moi. liaisons dangereuses du couple et de la famille
L’auteur interroge les modifications de la structure de la personnalité liées aux changements spécifiques de la société et de la culture, et principalement les modifications de la vie familiale et des modes de socialisation.
Le thérapeute familial se doit de prendre en compte la dimension sociale du narcissisme. Il s’avère nécessaire de travailler les liens conjugaux et familiaux en relation avec les impératifs de la liberté et de la faiblesse des contraintes extérieures pour les réguler.
Philippe Bessoles : le crime adolescent. Criminogenèse et processus adolescens
En regard de plusieurs expertises médico-psychologiques d’adolescents criminels, nous proposons une contribution à l’étude de la criminogenèse. Le crime adolescent traduit les impasses du processus adolescens par une actualisation de l’originaire infantile. Les enjeux de violence criminelle révèlent les avatars du diptyque « séparation/individuation ». Le crime est un appel à la représentativité sur fond d’angoisses agonique et anaclitique. Il incarne une « figurabilité aliénée » selon la proposition de M. et E. Laufer mise en acte dans le crime en réponse à une situation vécue par le criminel comme déshumanisante.
En référence aux travaux de P. Aulagnier sur le principe d’auto-engendrement, nous proposons d’articuler la criminogenèse aux distorsions d’accordage mère/infans, aux défaillances du pare-excitations et des enveloppements psychiques primaires et aux caducités des réponses maternelles aux signes émis par l’enfant.
Jacques Hochmann : effets de mode et psychothérapies
La réalité psychique n’est plus à la mode. Les thérapies inspirées de l’hypnose ou de la théorie de l’apprentissage sont seules considérées valides. La psychanalyse devrait étudier leur fonctionnement pour éclairer leurs modes d’action.
Ignacio Melo : réflexions sur le rôle de la pulsion et du narcissisme en psychothérapie de l’adolescent
L’adolescence se caractérise par une instabilité et une vulnérabilité des régimes de fonctionnement psychique à l’intérieur desquels la pulsion s’oriente vers des destinées diverses et potentiellement changeantes. Cette problématique s’actualise dans les séances de psychothérapie, infléchissant leurs décours. Par ailleurs, la remise en jeu du narcissisme dans les dialogues thérapeutiques induit d’autres paramètres, plus particulièrement celui que j’ai nommé « la transitionnalisation des échanges », dont je parle en relation avec le corps. La pulsion est étudiée sur un plan théorique, et sa place est analysée dans les différents régimes de fonctionnement psychique qu’on peut trouver en séance. Leurs variations rapides peuvent poser un problème. Dans ce contexte, transformer ce qui peut paraître un obstacle au bon déroulement de la cure en ressource thérapeutique me paraît un objectif clinique et théorique. Ce travail pourrait constituer une base de réflexion, qui devrait se poursuivre et se compléter dans l’avenir.